« L’objectif de fixer les prix payés aux producteurs à partir d’indicateurs de coûts de production (par le bais d’ordonnances à venir) est un renversement sans précédent des logiques de négociation »,explique Xavier Hollandts, enseignant-chercheur à KEDGE Business School et spécialiste des questions agricoles. Cette mesure sera associée au relèvement du seuil de revente à perte de 10% et à un encadrement des promotions en valeur et en volume.
Mais si la filière agricole veut survivre, l’Etat, comme l’a dit le Ministre de l’agriculture Stephane Travert, doit s’engager encore plus fortement.
Xavier Hollandts va plus loin en soulignant qu’il doit « avoir un rôle beaucoup plus contraignant que par le passé. Jusqu’à présent l’Etat s’est simplement contenté de constater et rendre objectif le malaise paysan. Dans certaines filières (légumes, lait), les agriculteurs ne touchent qu’une portion très minime de la valeur, bien en deçà des coûts de production. En conséquence, 1 agriculteurs sur 3 touche moins de 350 euros par mois ».
Plusieurs dispositifs sont déjà en place mais sont encore insuffisants : l’Observatoire des prix et des marges France Agrimer, fournit par exemple, un état des lieux statistique et circonstancié des différents niveaux de prix et de rémunération à chaque maillon de la chaine alimentaire.
- d’un contrôle renforcé de la DGCCRF (en charge notamment des relations entre distributeurs et fournisseurs et de la lutte contre les pratiques commerciales déloyales)
- d’une réelle contractualisation à partir des coûts de production des producteurs (ce qui semble être l’orientation du gouvernement)
- d’un renforcement ou de la création d’amendes et de sanctions pour ceux qui ne respectent pas les règles (à souligner que les acteurs des filières agricoles ont signé une charte à ce sujet le 14 novembre dernier)
Les mesures annoncées vont être expérimentées pendant deux ans mais sans contraintes particulières si ce n’est la bonne volonté des acteurs de la filière. Quelles garanties ont-donc les agriculteurs que ces mesures vont être acceptées et respectées ? Car au-delà de la question d’un revenu décent pour les agriculteurs, il en va de la santé de l’agriculteur française. L’exemple de la filière bio, où l’essentiel des produits sont importés de l’étranger, montre qu’il est urgent de construite des filières nationales robustes.
Cela passe sans doute par un encadrement contraignant, des relations, des négociations et donc des prix des filières agricoles. Sans cela, les Etats Généraux de l’Alimentation ne seront qu’une énième tentative de résoudre des problématiques existant depuis plusieurs décennies. Jusqu’à présent, les bonnes intentions des acteurs n’ont que trop rarement été suivies d’effets,
Xavier Hollandts est à votre disposition pour toute demande de reportage et d’interview sur ce sujet d’actualité en français et en anglais.