Le Grand Paris n’est pas qu’un projet d’infrastructures. Il pose une question essentielle : comment ses habitants peuvent-ils s’approprier cette nouvelle entité métropolitaine ? Si la transformation matérielle des territoires est en marche, la cohésion identitaire et le sentiment d’appartenance restent des défis majeurs.
Car en effet, l’identité du Grand Paris est fragmentée. La région parisienne a toujours été marquée par des fractures profondes :
• Paris intra-muros, avec une identité forte, souvent perçue comme élitiste. Est-ce encore le cas aujourd’hui ?
• La petite couronne – 92, 93, 94 – entre gentrification, précarité et rénovations contrastées.
• La grande couronne et les zones périurbaines, où l’attachement au cadre de vie semi-rural ou pavillonnaire reste déterminant.
Dès lors, une question se pose : le Grand Paris n’est-il pas une identité imposée d’en haut ? Beaucoup le perçoivent comme un projet technocratique, porté par l’État et des logiques économiques. Les nouvelles infrastructures – transport, pôles économiques – sont des moteurs de transformation, mais pas forcément des éléments fédérateurs.
Alors, comment s’approprier cette entité ?
La mobilité peut-elle être un levier d’appartenance ? Le Grand Paris Express va rapprocher les territoires, créant potentiellement un sentiment de proximité métropolitaine. Mais est-ce suffisant ?
Et qu’en est-il des identités locales, si fortes dans certaines communes comme Montreuil ou Saint-Denis ? Plutôt que de les écraser, le Grand Paris ne devrait-il pas chercher à les valoriser et les intégrer dans un projet commun ?
Enfin, la culture et les grands événements peuvent jouer un rôle crucial. Les Jeux Olympiques de 2024, les festivals métropolitains, les projets culturels intercommunaux pourraient être des catalyseurs d’un sentiment collectif.
Mais aujourd’hui, le récit du Grand Paris reste à écrire. Il ne s’agit pas d’imposer une identité unique, mais bien de créer des ponts entre des territoires historiquement séparés. Si les habitants voient des bénéfices concrets – en matière de cadre de vie, de transport, d’opportunités – alors, peut-être, le Grand Paris deviendra plus qu’une infrastructure : une métropole à taille humaine, porteuse d’un véritable projet partagé.
Mais aujourd’hui, cette appropriation est-elle réellement en cours ? Ou reste-t-on dans un projet pensé avant tout pour les infrastructures ? C’est tout l’enjeu de ce territoire en devenir.