Le succès du Rafale ou l’effet Ketchup

Marketing & nouvelle consommation

publication du 21/06/2021

Cet article a été co-écrit avec Robert Salle, professeur émérite à l’EM Lyon Business School

Pourquoi un produit rencontre-t-il soudainement le succès après des mois ou des années d’échec ?

Alors que la crise sanitaire et ses effets économiques délétères semblaient devoir occuper le devant de la scène tout au long de l’année, un invité inattendu est venu bousculer l’omniprésence du Covid-19 : le Rafale. « La Croatie sélectionne le Rafale », « L’Égypte fait l’acquisition de 30 Rafale supplémentaires », « Pourquoi le contrat de 18 Rafale avec la Grèce a été si rapide ? », « L’Indonésie très, très proche de monter à bord du Rafale »…  a-t-on pu lire ces derniers mois dans la presse française.

Qu’est-ce que le Rafale ? Un appareil que le groupe Dassault Aviation présente à juste titre comme le dernier-né de ses avions de combat même si, en réalité, il est déjà assez âgé puisque le premier prototype a volé en mai 1991, soit il y a exactement 30 ans.

Pendant plus de vingt ans, cet avion a connu de très nombreuses difficultés limitant sa vente : la fin de la guerre froide laissant croire à l’avènement de relations internationales moins tendues, la limitation des budgets militaires, l’échec des négociations avec plusieurs pays au début des années 2000.

A telle enseigne que cet appareil était souvent qualifié d’invendable par les experts, qui lui collaient une réputation d’avion maudit.

Et puis soudain, au milieu de la dernière décennie, les ventes à l’international ont commencé à décoller, puis se sont multipliées pour atteindre l’état actuel de succès commercial mondial.

On appelle cela « l’effet ketchup » : la sauce peut rester longtemps dans la bouteille malgré des secousses vigoureuses.

Mais, lorsqu’elle s’écoule, c’est tout d’un coup. Un phénomène bien connu des marchés financiers, qui peuvent parfois être gagnés par une étonnante forme de léthargie.

Pendant plusieurs semaines, les grands indices peuvent fluctuer sans amplitude, les volumes d’échange rester particulièrement faibles, les parités monétaires être coincées dans des marges étroites, comme si les intervenants s’étaient mis en mode « pause ».

Et puis, d’un coup, sans vraiment qu’un acteur  soit intervenu de façon décisive, les marchés font preuve d’une forte intensité. Le ketchup s’écoule de la bouteille et les affaires reprennent.

On retrouve le même effet ketchup au démarrage du marché de l’alimentation bio, au début de la dernière décennie (après des années d’attente) et, plus récemment, au démarrage du marché de la voiture électrique faisant suite à des décennies de léthargie.

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