Le guide Michelin : son influence décline de 85% ces 20 dernières années

Alimentation, Vin & Hospitalité

publication du 14/03/2024

Alors que la ville de Tours accueillera le 18 mars prochain la cérémonie 2024 du guide Michelin, ses responsables prient pour que l’actualité nationale ou internationale ne vienne perturber la grand-messe. Un nouveau virus, une guerre, un mouvement social d’ampleur et ce serait l’annonce de la nouvelle sélection qui en ferait immédiatement les frais.

Or, le guide Michelin ne peut plus s’accorder le luxe de voir ses annonces insuffisamment relayées et commentées dans les médias tant son influence a chuté, selon une étude récente d’Olivier Gergaud, Professeur d’économie et Directeur du centre de recherche Food, Wine & Hospitality de KEDGE Business School. 

Olivier Gergaud a mené une étude comparative sur la popularité des sites Internet de 5 guides gastronomiques majeurs : Guide Michelin, La Liste, Le Fooding, Gault & Millau et 50 Best. Elle démontre que la popularité du Guide Michelin sur Google a chuté de 85% depuis une vingtaine d’années au profit de ses concurrents et à plus forte raison en région parisienne où la concurrence entre guides est plus intense qu’ailleurs.

Cela signifie que les internautes étaient en 2004 près de sept fois plus nombreux à s’intéresser aux jugements du guide qu’aujourd’hui. L’influence du célèbre Guide Rouge avoisine désormais celle du Fooding, le guide créé par Alexandre Cammas en 2000, que Michelin a racheté en 2020. Et pour cause, la concurrence entre les deux guides est particulièrement intense dans la région Ile-de-France. La popularité de Michelin résiste bien à l’étranger en revanche où le guide développe ses activités à dessein.

A l’heure où les alertes aux fermetures de restaurants étoilés se multiplient dans toute l’Europe –et au-delà– sous fonds de crise économique, il est important de documenter l’influence réelle du Guide Michelin qui domine l’univers de la gastronomie depuis 1926.

Il est temps également que les cheffes et chefs ainsi que les médias prennent conscience que d’autres voies de reconnaissance –moins coûteuses et risquées financièrement– existent dans le paysage gastronomique français

Olivier Gergaud

Le modèle Michelin est en effet réputé pour engendrer des investissements élevés qui, au fil du temps, deviennent sources de stress intense et contre-productif pour les chefs et cheffes qui craignent de ne pas être en mesure de rembourser les emprunts bancaires en cas de rétrogradation, synonyme de baisse du chiffre d'affaires.

La concurrence sur le marché de l’évaluation en gastronomie progresse enfin en France. C’est une excellente nouvelle pour les cheffes et chefs comme pour les consommateurs. C’est une moins bonne nouvelle en revanche pour le Guide Rouge qui continue de perdre des parts de marché et se retrouve contraint de faire le buzz avec, notamment, des rétrogradations spectaculaires de chefs emblématiques, dans le but de susciter l’intérêt des médias.

Olivier Gergaud

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