Les métaux rares ont pris une place importante dans les sociétés occidentales et sont présents dans une majorité de produits utilisés quotidiennement : ordinateurs portables, smartphones, ampoules à LED, panneaux photovoltaïques, batteries pour véhicules électriques, etc. L’Union européenne (UE), consciente de sa dépendance envers les principaux pays producteurs de ces métaux notamment révélée par la crise du Covid-19 et la guerre en Ukraine, a fait le choix de relocaliser l’extraction de certains métaux sur son territoire, avec l’ouverture de nouvelles mines.
En 2022, par exemple, la société Imerys projette de créer une mine française de lithium. En effet, la Russie reste l’un des principaux exportateurs de palladium et de platine, tandis que l’Ukraine produit, quant à elle, une grande partie du lithium exporté en France.
Face à cette situation, les entreprises tentent également de s’adapter, et notamment le secteur automobile qui connaît une crise s’agissant de l’approvisionnement en semi-conducteurs. Certains constructeurs soulignent l’importance d’en relocaliser la production en Europe. Renault entend désormais entretenir une relation très étroite avec le fournisseur de puces français STMicroelectronics afin de sécuriser l’approvisionnement, essentiel dans la production automobile.
Ces ruptures ne sont pas seulement un enjeu industriel, mais aussi un enjeu stratégique pour les États. C’est pourquoi la France a choisi d’injecter une enveloppe de 700 millions d’euros pour renforcer son tissu industriel et technologique. La France poursuit l’objectif de retrouver sa souveraineté technologique, en lançant notamment le projet « Nano 2022 », pour préserver le contrôle des technologies nécessaires aux secteurs de l’industrie et de la défense.
De plus, la France entend investir massivement dans ce secteur, en propre et aux côtés de l’UE, en mettant en place un plan d’investissement « France 2030 », à hauteur de 30 milliards d’euros pour permettre à la France de réaliser sa transition énergétique et numérique, tout en restant compétitive sur le plan industriel.
Problématiques éthiques
Tel est le cas du lithium par exemple, qui pourrait être exploité sur le territoire national. Cette relocalisation permettrait ainsi de limiter les impacts environnementaux, et de rendre la chaîne d’approvisionnement de ces métaux plus transparente. En effet, l’exploitation de ces métaux, et principalement des terres rares en Chine, a un impact important sur l’environnement, l’atmosphère, les sols et les eaux. Ces impacts, ainsi que les problématiques d’éthique liées aux conditions de travail, sont en partie imputables aux réglementations des pays producteurs. À cet égard, la relocalisation des productions minières en Europe permettrait dans une certaine mesure de limiter l’impact de ces activités.
Les consommateurs, eux aussi, s’interrogent et s’engagent davantage sur les questions de développement durable. Or, nos recherches montrent que, dans le contexte actuel, les entreprises peuvent impliquer ces acteurs finaux afin de répondre aux enjeux environnementaux et éthiques. Cette intégration est donc devenue un axe stratégique pour les entreprises afin de répondre à plusieurs critères : que ce soit pour réduire les risques d’approvisionnement, augmenter la performance, améliorer la durabilité ou encore la disponibilité des ressources grâce au recyclage.
Par exemple, le 17 novembre 2021, le géant américain du numérique Apple a annoncé le « Self Service Repair ». Il s’agit d’un service permettant aux utilisateurs d’effectuer eux-mêmes certaines réparations, comme le changement de la batterie, de l’appareil photo ou de l’écran. L’utilisateur reçoit un manuel et des outils pour l’aider à effectuer ces réparations en toute sécurité. L’objectif de cette réparation par l’utilisateur est de répondre aux enjeux de durabilité en lien avec l’exploitation des métaux rares grâce à une longévité accrue des produits technologiques.
Incitation au recyclage
Cette méthode d’intégration, parmi d’autres, fait référence aux « user toolkits », et permet de transférer les tâches normalement effectuées par l’entreprise à l’utilisateur, rendant ainsi le processus moins cher et plus rapide tout en maintenant une qualité élevée. Cet exemple met en évidence que le consommateur peut jouer un rôle accru pour répondre aux enjeux environnementaux et éthiques liés aux objets comprenant des métaux rares. Les entreprises peuvent donc tirer avantage des consommateurs afin de proposer des produits plus durables.
Les États souhaitent également impliquer ces consommateurs. En France, en avril 2022, dans le cadre de l’élection présidentielle, le président de la République Emmanuel Macron a ainsi émis la possibilité de mettre en place un dispositif de collecte des objets usagés (téléphones, tablettes, ordinateurs entre autres) moyennant une somme d’argent, permettant ainsi de favoriser la filière du recyclage.
Cette reconnaissance des enjeux liés aux métaux rares par les entreprises et les États, liée aux conjonctures actuelles (pandémie, guerre en Ukraine…), constitue une première étape vers une prise de conscience globale incluant ainsi les consommateurs en leur donnant un rôle actif. L’intégration des consommateurs permet ainsi de résoudre le problème de longévité grâce à la réparation et au recyclage, limitant les besoins en approvisionnement et de ce fait permettant la réduction de dépendance face aux métaux rares.
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