Est-il possible d’annuler la dette publique ?

Finance

publication du 25/01/2021

La crise de la Covid a balayé bien des dogmes qui prévalaient depuis que les dettes publiques des pays développés ont explosées.

Alors, comme un marronnier, la tentation du défaut de paiement volontaire revient régulièrement, chez les politiques, mais aussi chez les économistes.

Selon Pierre Gruson, des contraintes existent et on ne peut les ignorer. D’après lui, plusieurs raisons rationnelles écartent l’option du remboursement des dettes publiques :

  • La dette publique française est détenue à 24 % par des institutionnels français. Ne pas la rembourser, c’est la quasi-certitude de mettre en faillite des banques, des compagnies d’assurance, d’assurance-vie et des fonds de retraites.
  • Plus de la moitié de la dette est détenue par des non-résidents (52%). Ces investisseurs institutionnels ne manqueraient pas de nous traîner en justice, avec le risque de ne plus pouvoir emprunter sur ces marchés financiers. Le simple fait d’envisager le défaut de paiement volontaire conduirait à augmenter le coût de financement de la dette publique et en aggraverait encore le poids.
  • Une part importante de notre dette est dans les comptes d’autres banques centrales. A l’image de la Banque de France, chaque banque centrale détient des devises pour assurer les besoins commerciaux et financiers de ses ressortissants. Une décision unilatérale entraînerait immédiatement la réciprocité du défaut de paiement. Le commerce international se gripperait. Toutefois, l’annulation acceptée d’une partie de ces dettes réciproques est possible. Elle soulagerait les ratios de 10 à 20 pour cent. Cette perspective devient de moins en moins taboue à mesure que nous préparons la sortie de crise sanitaire.
  • De même, il semble difficile de décréter le non-paiement de la dette tant que nous ne sommes pas à l’équilibre budgétaire. Comment emprunter à nouveau le jour d’après et vouloir faire croire aux investisseurs, que cela n’arrivera plus, que c’est même pour leur bien ? 
  • Les Etats sont en concurrence pour drainer les capitaux internationaux disponibles. Les taux restent négatifs, y compris à long terme. Voilà pourquoi, les responsables européens balayent toute proposition d’annulation de la dette d’un pays membre. Il ne faut pas laisser le doute s’installer.

Si l’impact d’une annulation de la dette publique semble pire que sa prise en charge, il ne faut pas négliger les mesures d’aménagement.

Il faut imaginer des mesures de politique budgétaire non conventionnelles, à l’image de ce qui a été fait avec la politique monétaire pour digérer la crise financière.

Ainsi, émettre des emprunts de long terme, 50 ans, coupon zéro (obligations dont les intérêts sont capitalisés et versés dans leur intégralité à l'échéance du titre), représente une piste intéressante qui soulage la trésorerie de l’Etat de près de 100 milliards d’euros sur 10 ans.

Pourquoi ne pas renforcer cette pratique ? c’est-à-dire émettre une part croissante des nouveaux titres à zéro coupon, voire substituer des titres zéro coupon aux titres existants.

Vous pouvez retrouver l'article complet sur Le Monde : Dette européenne : « Comme un marronnier, la tentation du défaut de paiement volontaire revient régulièrement »