Quelle école pour « le monde d’après » ?

Développement durable

publication du 29/07/2020

Dans un monde en constante mutation, quelle transformation le monde universitaire doit-il entreprendre ?

En ces temps où les organisations tentent de gérer des plans de crise (ou de sortie de crise) suite à la pandémie du COVID19, l’antagonisme habituel entre ceux qui pensent être réalistes et ceux qui croient en l’utopie d’un monde nouveau, se remet en branle. Les uns voulant « sauver ce qui est sauvable », les autres souhaitant quant à eux « profiter de la crise pour tout remettre à plat ». 

Chacun a bien sûr la certitude d’être du bon côté. Pour les uns, le pragmatisme consiste à revenir au plus vite à un « business as usual » qu’ils ont l’impression de maitriser et pensent être la seule option pour préserver les bienfaits du monde moderne. Pour d’autres, le pragmatisme, c’est la nécessité de repenser le système et de réfléchir à ce que devrait être le monde, afin notamment de construire un système plus juste et plus résilient aux prochaines crises qui, selon eux, semblent être tout aussi inévitables que radicales.

Peut-être est-il temps de quitter ces guerres de position ?

Dans un monde en constante mutation, où tout est lié, interconnecté, interdépendant, chacun d’entre nous est amené à prendre des décisions en intégrant à la fois ses propres objectifs de performance et hiérarchiser des actions qui vont avoir des impacts, parfois opposés, sur différentes parties prenantes, à différents moments. 

Afin d’améliorer la performance, la résilience, l’organisation et la culture des entreprises qu’ils vont intégrer, nous poussons nos élèves à enclencher un mouvement perpétuel entre le court terme et le long terme, à l’échelle de quelques acteurs et à celle du système dans son ensemble. Nous apprenons chaque jour à respirer entre différents espaces, temporels et physiques.

Cesser de vivre en apnée et trouver une respiration. 

Aucune organisation, mouvement ou individu ne peut ignorer la quête de satisfaction à court terme de certains acteurs clés. L’organisation doit trouver les ressources aujourd’hui lui permettant a minima d’honorer ses engagements vis-à-vis de ses clients, de ses salariés, de ses fournisseurs, de l’état, et de ses créanciers. Mais elle doit aussi s’interroger sur la manière de pouvoir le faire dans le futur. 

Le manque de résilience de notre système prouve chaque jour à quel point les organisations ont du mal à voir plus grand, plus loin, de manière systémique et peinent à intégrer les enjeux d’un plus grand nombre de partie prenantes dans leur prise de décision. Et ce, bien que ces enjeux mettent en question la survie même de notre civilisation et accessoirement de l’économie. 

Il s’agit donc, en quelque sorte, d’être en capacité de faire des aller-retours perpétuels. Car on ne peut pas vivre en apnée très longtemps. Ce qui me permet de vivre, ce n’est pas d’expirer ou d’inspirer, c’est de faire les deux. 

Une métamorphose nécessaire des pratiques du monde universitaire.

Pour ma part, je suis convaincu qu’il est utopique de croire au « business as usual » en misant sur le fait que l’homme va réussir à faire face à toutes les crises qui arrivent en changeant marginalement. Le pragmatisme doit nous pousser à reformater le système. Ce qui est vrai pour le monde l’est aussi pour les établissements d’enseignement supérieur qui doivent se repenser et muter autour de trois grandes missions : 

  • D’une part, aider nos apprenants à maitriser les métiers actuels pour trouver rapidement un travail qui existe déjà dans les entreprises. C’est essentiel, et quelque part c’est ce que font, ou devraient faire depuis longtemps toutes les bonnes écoles.
  • La deuxième mission, plus complexe, vise à former nos étudiants à des métiers qui n’existent pas encore, dans des entreprises qui n’existent peut-être pas non plus. Pour cela, les écoles doivent aider leurs étudiants à comprendre le monde et ses enjeux, à imaginer différents scénarios. Surtout, les écoles ne peuvent plus se contenter d’enseigner des matières applicables toute une vie mais doivent apprendre à apprendre.
  • Enfin, la troisième mission consiste à accompagner les étudiants pour que non seulement ils se sentent à l’aise dans un environnement incertain mais qu’ils maitrisent aussi « la survie en milieu complexe ». Il s’agit d’apprendre la résilience, pour savoir oser et se relever de ses échecs. C’est pour cela que Kedge investit massivement depuis des années sur le développement de « soft skills » (via le parcours BeU et la pédagogie Pro-Act).

Si les enjeux sont bien réels, l’humanité se situe face à une opportunité absolument unique. Nous avons aujourd’hui conscience des problèmes et la technologie nous permet de connecter les personnes et les idées partout dans le monde, de trouver collectivement des solutions et de s’inspirer des exemples de solutions qui marchent. 

Dans ce monde-là, les entreprises les plus performantes et les plus résilientes seront celles capables de reconnecter leurs propres enjeux à ceux qui se posent pour la société toute entière. 

Ce qui m’anime à Kedge, c’est la conviction que nous accompagnons les étudiants à devenir les acteurs du changement dont le monde et leur future entreprise ont besoin.